
En deux générations, les Forsyte ont réussi leur ascension et sont devenus des bourgeois. Leur père avait déjà « un talent spécial pour remuer la brique et le mortier » puis les six frères « ont si bien mené leur barque, qu’ils jouissaient tous, comme on dit, d’une certaine position. »
Ils sont très liés mais pas par l’affection, plus exactement par un respect des conventions, une façon d’être : pas de dépenses inutiles, pas d’originalité et une prudence de tous les instants. Rien n’est laissé au hasard : « Ils envoyaient assez régulièrement leurs femmes et leurs enfants aux églises à la mode de la capitale. Un doute sur la sincérité de leur foi les eût peinés, surpris. »
Le grand personnage du roman est l’aîné, le vieux Jolyon dont l’autorité morale est grande. Il a coupé les ponts avec son fils qui a quitté femme et enfants pour partir avec la gouvernante et a porté toute son affection sur sa petite-fille, June Forsyte. Le roman s’ouvre justement sur les fiançailles de June avec un jeune et inquiétant architecte désargenté, Phil Bosinney. Ses manières sont suspectes et un sombre pressentiment agite la famille.

C’est alors que Soames Forsyte, jeune homme de la troisième génération, a l’idée de devenir propriétaire d’une grande maison à la campagne. Il demande à Bosinney de se charger de la construction. Ce choix surprend et puis la famille se demande si le projet de Soames est bien raisonnable : tant d’argent ainsi dépensé…
Mais le ménage de Soames va mal. Il n’ arrive pas à se faire aimer d’Irène, sa ravissante épouse. Alors l’idée de changer d’air, pourquoi pas ? Mais rien ne se passera comme prévu.
Le propriétaire est le premier volume du cycle des Forsyte qui eut tant de succès en Angleterre et valut le prix Nobel à son auteur. C’est une analyse très fine, et assez grinçante, d’une famille emblématique de l’Angleterre de 1900. Ils ne sont pas tous attachants, loin de là mais ils symbolisent parfaitement les qualités et les défauts de ce pays.
La psychologie des personnages est fort bien restituée avec quelques très beaux passages : « Dans la sécurité produite par un grand nombre de pacifiques mariages, on avait oublié que l’amour n’est pas une fleur de serre, mais une plante sauvage, née d’une nuit de pluie, d’une heure de soleil, jaillie d’une graine folle qu’un vent de désordre a jetée sur la route. »
De la bonne littérature.
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